Maison Zilveli

Paris, 75019

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Restauration et réaménagement d’une maison.


Époque
1933
réalisé par Jean Welz


Protection
PLU édifice remarquable du XXe siècle


MOA
privé


Stade
études livrées


Année
2019


Mission
études historiques
état sanitaire et structurel


MOE
Lankry architectes mandataires
Atelier u3a architecte du patrimoine

De la fragilité de la structure de la maison

Nous sommes en 1933; la maison Zilveli se construit sur les pentes de la Butte Bergeyre. L’architecte tire parti de l’exiguïté de la parcelle pour développer les espaces en hauteur, la zone jour se trouvant au 1er étage. La zone nuit sera installée sur le RDC et le 1er étage du côté rue, dont la façade ne portera aucun décor mais le percement de trois simples fenêtres. Le volume extérieur a beaucoup d’allure et les espaces intérieurs s’ouvrent à la lumière par les côtés et par le haut. Seul le mur nord restera aveugle.

La distribution se fait sur un split-level afin de rendre les espaces autonomes. Un escalier, bien que de petite taille, s’affiche comme le pivot central de la maison. Tout semble parfait, mais si on croit que la structure de la maison pouvait s’avérer très hardie pour l’époque, elle s’est révélée avec le temps, fragile et mal appareillée.

Nous sommes entre les deux guerres: le béton, ce matériau du mouvement moderne, vit sa pleine expérimentation. Le manque du retour d’expérience et la carence d’un acier de qualité, réquisitionné pour les armements, retardent ses exploits à l’exception de rares réalisations qui feront histoire. En effet nous ne sommes qu’à ses débuts et l’audace de l’invention de la précontrainte de Freyssinet (1928) n’est pas encore à la portée de tous les architectes.

Qu’en serait-t-il alors du béton de la Maison Zilveli?

Plusieurs arguments surgissent, et de nombreuses questions se posent. Jean Welz a 32 ans au moment du projet. Il n’a que l’expérience de salarié d’agence, et bien qu’apprécié, il n’arrive pas à atteindre le rôle de chef de projet. Il se fait remarquer par sa sensibilité spatiale, mais le peu d’expérience de chantier ne lui permet pas de maîtriser pleinement les techniques de construction du béton et ses limites.

La villa Zilveli sera donc construite d’une façon quasi aventureuse. Les poteaux de la construction s’avéreront trop fins pour recouvrir correctement les nombreux fers nécessaires à la contrainte du flambement. Les façades latérales, au lieu de fonctionner comme des poutres en toute hauteur, seront composées de briques creuses en remplissage de la structure poteau-poutre. L’entre-axe des poteaux, sera trop grand pour maintenir compacte la forme de l’édifice. De plus, par l’instabilité du terrain, la maison a commencé à se fissurer et à se disloquer.

Des interventions en cours de chantier tentent de combler les défauts constructifs et les déformations inévitables par des contreventements. Il est possible d’en porter le témoignage puisqu’elles sont présentes sur l’édifice et absentes sur les plans de permis de construire et d’exécution.

De l’importance de la conservation de la mémoire du mobilier

Il est clair que cette maison a été peu ou mal entretenue. Néanmoins, l’abandon prématuré de la maison a évité que des ultérieurs aménagements intérieurs pouvaient dénaturer son architecture. En fait, tout ce qui est d’origine est encore sur place. Nous pouvons encore trouver ses revêtements en carrelage, le parquet, les menuiseries comme les portes, les poignées, les fenêtres, mais ainsi l’escalier avec son garde-corps, les sanitaires et les robinetteries, la cuisine avec son mobilier, les radiateurs et les rangements. Des photos d’époque peuvent d’ailleurs témoigner de cette fidélité.

Nous regrettons la disparition récente de la table à manger qui était encastrée au sol et au mur. De même, le balcon et sa fine et longue joue démolis dans l’urgence dans les années ‘80, sans qu’une documentation préalable a pu s’établir pour le relever. La matière perdue, (il semble que ce balcon possédait un banc et une table pour s’asseoir, lire, écrire et voir de loin les toits de Paris) ne pourrait se reconstruire que grâce aux plans d’origine qui ont été conservés par les anciens propriétaires.

La maison est aujourd’hui déclarée en péril et a été étayée. Des étaiements ultérieurs sont au programme afin de mettre en sécurité les locaux et permettre une étude poussée de l’édifice.

Comment restaurer

Nous nous soucions aujourd’hui sur la possibilité de restaurer cet édifice. Son état sanitaire nous fait craindre que seule sa reconstruction puisse permettre sa conservation. Si cette solution devait s’avérer comme incontournable, le relevé et l’échantillonnage des parties constituant l’aménagement intérieur, ainsi que le relevé détaillé des menuiseries extérieures, sera également nécessaire. Nous avons démarré cette phase à titre de précaution, mais elle avance très lentement à cause du péril de la maison.

Depuis le début de notre étude, nous avons constaté que la déformation de l’édifice est encore en cours et une deuxième campagne d’étaiement démarrée en septembre a été nécessaire pour sécuriser le site. Nous espérons pouvoir continuer notre relevé et prise d’échantillons dans des meilleures conditions.

Observations sur les déformations de l’édifice

L’état de fissuration de l’édifice s’accompagne d’un dévers sensible des poteaux, des parois et des inclinations des planchers que nous avons mesurés entre 3 et 6%. Puisque la situation est encore en sensible évolution, la ville de Paris ayant déclaré le péril de l’édifice, diverses campagnes d’étaiement ont été réalisées par Les charpentiers de Paris afin de stabiliser l’évolution de la dégradation structurelle.