Lycée
Champollion
Grenoble, 38000
Champollion
Restructuration d’un lycée.
Année
2015
MOA
Région Rhône-Alpes
MOE
Soria architectes mandataires
Atelier U3A architecte du patrimoine
Réalisé en 1883 par l’architecte Emile Vaudremer, cet ensemble en « damier » se concrétise par la succession de grandes cours couronnées de portiques intégrés dans les volumes ou en excroissance en forme d’appentis. Les cours sud sont ouvertes sur la rue, permettant un ensoleillement sur toute la surface pavée. Les édifices encadrant les cours se composent de longues barres dont la hauteur est presque constante, à la différence des points de croisements, où celles-ci se transforment en tourelles par l’ajout d’un étage et parfois d’un clocheton avec horloge. Ces tourelles indiquent dans la plupart des cas une entrée et plusieurs accès brisent ainsi la linéarité des façades le long des rues. Les façades expriment le langage architectural traditionnellement grenoblois, où les recours verticaux des pierres de chainage s’alternent à un parement simple et enduit et des décors en terre-cuite.
Le lycée Champollion a été construit en plusieurs campagnes de travaux, de 1883 à 1957. L’architecte Joseph Auguste Emile Vaudremer, auteur d’édifices parisiens comme la Prison de la Santé, le Lycée Buffon de l’Église d’Alésia et bien d’autres édifices de renommée ; d’autres architectes lui succéderont sur le Lycée Champollion, voici une liste synthétique en dates :
- première construction 1883 par l’architecte Joseph-Auguste-Emile Vaudremer
- Modifications du nouveau lycée de Grenoble proposées par M. Berruyer architecte 1888
- Réalisation du chantier par Michon, architecte municipal en 1896
- Travaux d’extension en 1957 par l’architecte Descotes-Genon
Les extensions ont été réalisées à l’intérieur des limites parcellaires. Des modifications ont été apportées, des édifices ont été ajoutés, d’autres démolis. Une église a été ajoutée. Cette église devait également être utilisé par les édifices avoisinants, ceci fut le cas également pour les cuisines et la cantine.
Au vu des plans disponibles aux archives, le pavillon séparant la cour E de la cour F a connu plusieurs états, adaptations, ce qui explique que, bien que s’apparentant à la composition architecturale du lycée, sa jonction avec les grandes ailes s’est faite parfois par des compromis, parfois forcés, compromettant la compostion architecturale d’origine.
Il est difficile de distinguer l’état d’origine. Le projet de Vaudremer semble avoir été modifié déjà à la toute fin du XIXe siècle. Caractéristique forte du langage de l’architecture de Vaudremer, le bandeau du chainage entre les pierres équarries, s’avère être sa signature. Cet élément se décline d’une façon épatante dans tous les édifices qu’il a réalisés. Un architecte portant une telle attention à la composition et à l’élégance du formalisme du parement n’aurait pas réalisé les extensions telles que nous pouvons les observer aujourd’hui.
Les extensions des ailes sud du lycée, réalisées dans les années 50 par l’architecte Descotes-Genon, ont retenu efficacement le parti architectural de Vaudremer. Intervenant après les modifications du XIXe siècle, où la surélévation du pavillon central avait déjà comporté entre autre une modification de la tête de l’aile longue, il a dû corriger, sur la façade de la cour D, un accident provoqué par les extensions XIXe. De cette contrainte, il a tiré parti changeant de rythme par l’émission d’une césure « moderne » tout à fait différente, mais particulièrement réussie. Descotes-Genon ne joua pas l’anachronisme, tout en respectant la « signature » de Vaudremer. La preuve de la particularité de cet ajustement se trouve par son absence en correspondance des extensions des autres ailes sur les cours C et B, où Descotes-Genon n’a pas trouvé nécessaire de reproduire cette césure, se plaçant dans la simple continuité. La réussite de l’intégration se porte sur le respect des gabarits, des proportions et des pas des travées.
La campagne des grandes extensions des années d’après-guerre des édifices scolaires se limita surtout à augmenter les espaces d’enseignement et de repos. Les normes techniques exigées dans cette période, ne différaient guère de celles de la fin du XIXe où l’on s’intéressait déjà à la question de l’ »hygiénisme ».
Au vu des plans disponibles aux archives, l’aile séparant la cour E de la cour F a connu plusieurs états, plusieurs adaptations. Bien qu’ordonnancée selon la composition architecturale du lycée, sa relation avec les grandes ailes s’est faite autour de compromis parfois malheureux. Le corps de bâtiment à l’analyse est composé à l’origine d’un pavillon central en avant-corps composé de 4 travées sans porte d’accès, de 2 étages plus combles avec un soubassement en pierre. Cet avant-corps est relié aux deux grandes ailes par deux petits bâtiments bas au niveau des appentis couvrant les circulations. Le projet d’origine de Vaudremer avait pris, au contraire, le parti de désaxer ce corps le considérant comme un retour haut de l’aile sur le boulevard Agutte Sembat, reliant ainsi les toitures et permettant un bon fonctionnement de l’écoulement des pluviales. Ce parti n’a pas été retenu, tandis qu’une autre version de plan apparaissant aux archives indique la centralité du pavillon avec ses deux ailes latérales.
Nous observons que ces ailes ont été surélevées par la suite, obstruant les baies hautes au droit des nouveaux pignons de toiture et provoquant des accidents sur les pluviales. La façade arrière du pavillon, présente des éléments indiquant que son appentis a été rajouté. Un plan d’archives en démontre l’absence. Des murets ont de plus comblé cet espace par la fermeture d’un jardinet privatif. Des colonnettes de portail témoignent de la présence d’une clôture aussi présente sur le plan d’origine. Cette clôture a été dénaturée par les aménagements d’une locale poubelle fermée par une grille, un autre local fermé dont on ne connaît pas l’usage (dépôt d’outils ?) et 2 cabinets de toilettes aujourd’hui hors normes.
La cour E reçoit aujourd’hui les fonctions charnière des cuisines. C’est un espace secondaire, insalubre, où les activités se côtoient sans règles d’hygiène. Les ajouts interviennent comme le témoignage d’aménagements improvisés. L’appentis adossé à la façade arrière a été créé avec la volonté d’y accéder de façon ouverte. Une poutre treillis bois porte des fermettes en bois à triangles inversés (assez inusuelles) supportant la couverture. La construction n’est pas récente et indique un besoin d’obtenir un espace ouvert sans poteaux, probablement utilisé à l’époque comme préau pour le lycée des garçons.
De l’observation de l’état existant, nous remarquons un autre fait : l’aile longue sur le Boulevard Agutte Sembat possède à l’aplomb de sa façade haute, de grandes ouvertures au RDC. Celles-ci devaient être prévues pour donner sur l’extérieur, puisque le fait de rechercher plus de lumière ne pouvait être compatible avec la présence d’un appentis. Vaudremer avait-il prévu au départ une réversibilité ? A ce jour, ces grandes portes son d’ailleurs réduites en hauteur puisqu’il est difficile les manipuler en raison de leur poids.