Atelier
Maurice Denis

Saint-Germain-en-Laye, 78100

00_78perr-arien

Consolidation et restauration d’un atelier d’artiste.


Époque
1912
réalisé par Auguste Perret


Protection
classé MH


MOA
Département des Yvelines


Stade
état sanitaire APS / APD


Année
2020-2023


Mission
études historiques
état sanitaire et structurel
consolidation structurelle


MOE
Atelier u3a architecte du patrimoine
PLUS architecture
TPF Ingénierie

On pourrait s’étonner qu’un grand architecte comme Auguste Perret se soit intéressé pareillement à des projets de petite taille comme celui qu’il a réalisé pour l’atelier de Maurice Denis à Saint Germain en Laye. En fait, l’architecte a réalisé d’autres édifices de petite taille et notamment pour des artistes à Paris, comme ceux pour Chana Orloff, Théo Van Rysselberghe, Mela Muter ou encore pour Georges Braque. Il est alors évident de dire que cet architecte s’intéressait aux artistes et faisait souvent appel à eux pour collaborer dans la réalisation de ses grands projets. Innovateur dans cette démarche, il développe la théorie de l’art nouveau, où l’architecture s’associe à l’expression artistique formant un tout.

Le cas de l’atelier de Maurice Denis est significatif et avant-coureur. Auguste Perret, porte une admiration et une amitié sincère envers cet artiste. Une amitié qui est documentée d’ailleurs par un échange épistolaire dont les dates nous attestent d’une longue relation amicale et quasiment jusqu’à la mort de Maurice Denis survenue en 1943.

Plus jeune d’à peine 4 ans de son ainé peintre, Perret a 38 ans en 1912 quand il réalise l’atelier pour son amis et collègue Maurice Denis. Il ne s’agit pas exactement d’une commande, mais de la construction d’un espace d’utilité permettant au peintre de réaliser les grands panneaux de décoration destinés à la voûte du Théâtre des Champs Élysées, première œuvre de grande envergure de l’architecte. Il est épatant de voir comment la structure des échafaudages du chantier du théâtre ressemble par sa finesse à celle de l’atelier qu’il réalisera en 1912 pour le peintre.

Contrairement à ce qu’on peut penser, Auguste Perret ne dédaigne pas le bois ; pour lui un matériau, que ce soit du béton, du métal ou du bois, il est choisi selon la nécessité de la structure et par les contraintes économiques. Le bois est également présent dans l’atelier de l’architecte et dans des formes simples et efficaces se rapprochant de celles utilisées pour l’atelier du Prieuré à Saint-Germain en Laye.

Les transformations de l’Atelier du Prieuré de 1913 à nos jours

L’atelier de Saint Germain en Laye est donc construit à toute vitesse puisque Maurice Denis ne trouvait pas, dans l’ancien Prieuré, un volume adapté à la réalisation des grands panneaux pour réaliser l’œuvre « L’Histoire de la musique », décor pour le Théâtre des Champs-Élysées à Paris. L’édifice sera installé dans l’angle sous le mur de soutènement qui sépare la parcelle de la rue de Fourqueux et l’ancienne rue du Fond de l’Hôpital, rebaptisée par la suite, rue Maurice Denis.

Rares sont aussi les photos d’époque de l’atelier, celles des extérieurs sont introuvables. Toutefois, l’architecture qui nous est parvenue, bien qu’elle ait été remaniée à diverses reprises, notamment pendant les années 40 et ensuite les années 80, nous témoigne distinctement ce qui est de son état d’origine.

Quelques hypothèses sur l’équilibre de l’édifice comme l’avait conçu Perret

Partant du principe qu’Auguste Perret était un architecte structuraliste affirmé, la structure de l’atelier Maurice Denis ne peut pas être défaillante. Elle a été certes, construite simplement pour durer le temps nécessaire à la réalisation des grands panneaux de « L’Histoire de la musique » pour le plafond de la salle de concerts. Mais il en a été autrement : Maurice Denis préfèrera continuer à travailler dans cet atelier, pour un certain nombre de raisons, notamment celui de la qualité de sa lumière.

Il s’agit alors plutôt d’un édifice construit rapidement, de façon provisoire et en toute économie afin que l’artiste puisse rapidement se mettre au travail. Ce qui ne devait durer que peu d’années a accompli aujourd’hui presque 110 ans. Sa prouesse est bien là. Une structure très fine et élancée, faite de matériaux pauvres, a pu résister tant bien que mal aux défaillances notables du sol, à un entretien inconstant et aux interventions qui se sont succédées, souvent d’une façon peu heureuse.

N’oublions pas que Maurice Denis décède des suites d’un accident de la route, à 73 ans et nous pouvons bien imaginer qu’il n’avait pas eu le temps de programmer la destination de son atelier. Peut-être, comptait-t-il encore en la présence d’Auguste Perret pour le consolider et le restaurer. Dans l’absence d’informations à ce sujet, nous ne pouvons savoir si le peintre désirait pérenniser l’architecture de son atelier. En fait, l’atelier s’intègre dans le paysage comme un pavillon de Thé au fond de l’allée du jardin, notamment car sa forme rabaissée sur la porte d’entrée, lui donnant l’aspect d’un petit et gracieux édifice, tandis que son intérieur nous révèle le potentiel d’un très grand volume.

Un document présent dans les archives du Musée Maurice Denis est de capitale importance et nous guide dans notre enquête. Il s’agit du Mémoire de Maçonnerie des travaux de gros œuvre réalisés en 1912 par l’entreprise Chaput et Daguet Entrepreneur, sous la direction des Frères Perret Architectes.

Observant la structure en bois, nous avons remarqué sur les façades ouest et est, une certaine incohérence des assemblages par rapport à la fonction structurelle des pièces de charpente. Nous ne pouvons pas attribuer ces défaillances à un manquement de diligence de l’architecte, même s’il avait considéré fermement que l’édifice avait une vie éphémère. Pour cette raison nous avons avancé des hypothèses sur la présence de pièces de contreventement en bois cachées dans la maçonnerie. Si ce n’est pas le cas, il sera nécessaire de les intégrer, chose que probablement aurait fait l’architecte envisageant un édifice dans sa pérennité. La dépose de la totalité du doublage intérieur au moment du chantier, pourra apporter une réponse à ce questionnement. Soit ces pièces sont effectivement présentes, mais se sont brisées à cause des problèmes de fondations, soit elles sont absentes et on pourra conforter l’idée de la frugalité d’un édifice éphémère. Le principe est celui de reproduire un état tel que l’architecte pouvait l’imaginer si l’édifice devait cibler une pérennité.

Nous avons également remarqué que certaines pièces de charpente de la toiture ont été amputées et contreventées tant bien que mal, pour le passage des deux conduites de ventilation. Cette intervention a porté un préjudice évident à l’équilibre statique de la structure, d’autant plus que cette opération n’a pas su s’opposer à la déformation générale que nous constatons aujourd’hui.